bah j'en remet une couche alors
special dédicace a Aphrael
D'abord les hommes vécurent de fruits et de venaison, ils essayèrent de vivre de pèche.
Ils tournèrent leurs regards vers les racines, vers les herbes; ils comprirent que leur salut, était dans cette admirable mère qu'on nomme la terre, et ils cultivèrent et soignèrent la féconde et généreuse nourrice. Alors l'agriculture naquit.
Il est probable que l'homme s'attacha, dès le début à la culture des végétaux qui lui semblèrent contenir le plus d'éléments nutritifs, à la Culture de ce qu'on appelle les céréales, et qui sont : le blé ou le froment, le seigle, l'orge, le maïs, le riz, l'avoine le millet, le sorgho, le blé noir ou sarrasin, quoiqu'il appartienne à une famille différente.
A ces graminées on peut ajouter les légumineuses fèves, haricots, pois, lentilles, gesses, etc., et plusieurs légumes à Racines : la pomme de terre, l'igname, la rave, la carotte. Telles furent-les premières bases de l'alimentation végétale.
L'agriculture frappa si fortement l'esprit des peuples, que, dans toutes les contrées où l'état sauvage ne s'est pas maintenu, on la trouve mêlée d'une façon ou d'une autre à la religion, comme une chose essentiellement divine. (1)
Ainsi, sans parler des diverses formes, des divers noms sous lesquels on a adoré la terre en Orient ou en Occident, chaque région voua un culte de reconnaissance à l'être qui, selon la croyance commune, avait appris aux hommes à labourer, semer, & moissonner. (2)
En ce qui concerne le blé, on a constaté qu'il manquait en Amérique lorsqu'on découvrit ce continent; à part cela, il est démontré qu'on l'a récolté dans tous les premiers temps sous les climats tempérés et chauds.
Quant au pain , tel que nous le mangeons, comme toute invention humaine, il a une histoire; mais cette histoire a de vagues commencements.
On sait pourtant que les Égyptiens traitent la fabrication du pain avec le levain plus de 1000 ans avant Moïse; par conséquent, qu'ils connaissaient les principes de la fermentation, le gaz carbonique et ses propriétés; qu'ils avaient des moulins, des fours et tout ce qui sert à la boulangerie.
Le Égyptiens font un pain avec de la farine de graine de Lotus et qui est comparable à du mil. Il est pétri avec de l'eau et du lait. ( Hérodote, Histoire, II, 92 ; Théophraste, Histoire des plantes, IV, 8,II).
Pline nous dit qu'il est consommé chaud et qu'il est facile à digérer et léger. Dans sa composition il est intégré parfois de la graisse blanche, du miel, des œufs. On y mêle aussi des fruits, comme de la figue, du palmier et du jujube. Les premières tartines " goûter de 4 heures " font leurs apparitions sous forme de galette de blé sucré sur lesquelles l'on étale, au choix, marmelade de date ou miel. (Histoire naturelle", XXII, 28).
Également, Athénée, nous parle du pain, notamment dans un long chapitre du Banquet des Savants (Livre III, 425 à 455). Références nombreuses au pain (panis) avec et sans levain, cuit au four (ipnite) , d'orge ou de seigle ( épeautre et tiphee). Athénée nous dit également qu'il est bon de manger du pain avec du vin, d'une part par ce-que le moelleux du pain est un plaisir, mais aussi "que le mélange dissipe souvent les fumées du vin qui commencent à porter à la tête...". De nombreuses références font état des textes de grecs anciens à propos du pain.
Nous soulignons intentionnellement : avec le levain, parce que l'Exode (texte de la Bible) nous apprend qu'après leur sortie d'Égypte, les Hébreux, durent manger du pain sans levain, du pain non fermenté, et cuit sous la cendre.
Le principe de la fermentation était donc connu en Orient ; l'usage du levain (ou pâte qu'on a laissé aigrir, ou levure de bière) ajouté au moment de la trituration à la pâte fraîche, afin de faire subir à cette pâte la fermentation, existait donc en Égypte et en Asie aux époques les plus reculées.
Plus jeunes, comme peuple, que les Indiens, et les Égyptiens, les grecs, ne firent du bon pain, du pain fermenté, que douze ou quatorze siècle avant l'ère vulgaire.
Pour les Romains, ils ignoraient encore la mouture lors de l'invasion gauloise.
Jusqu'à l'an 380 avant J.C., ils se bornèrent à torréfier le grain, puis à le concasser dans des mortiers de pierre avec des pilons de bois dur, garnis de fer. Avec le blé ainsi broyé, ils faisaient une sorte de bouillie qu'ils laissaient refroidir pour la couper ensuite par tranches qu'ils mettaient cuire au four ou sous la cendre.
Les guerres dans la Grande-Grèce, en Épire et en Macédoine, les initièrent aux procédés de la panification, et ils se servirent alors de farine obtenue à l'aide de moulins à vent, à eau, à bras ou à manège, et de levain.
Par la suite, les boulangers romains ne le cédèrent point aux boulangers grecs. La panification était plus avancée en Gaule qu'en Italie.
Nos ancêtres, prétend-on, ont appris des Grecs à faire le pain.
Ce qui parait hors de doute, c'est que les Gaulois fabriquaient du pain avec du levain ordinaire ou de la levure de bière, cinq ou six cents ans avant notre ère.
Le commerce de la boulangerie est à présent complètement libre; mais il n'en a pas toujours été ainsi.
Les particuliers mêmes n'ont conquis que fort tard la liberté de cuire le pain indispensable à leur consommation personnelle
Sous le régime féodal, le vassal était obligé de faire moudre son grain au moulin du seigneur, de faire cuire son pain au four du même, et de payer pour cela, un droit qu'on nommait banalité.
Le droit de four banal, dit Mr. Chéruel, était un privilège féodal. Le seigneur pouvait contraindre tous ceux qui habitaient ses domaines à venir aux moulins et au fours banal. Ce droit de banalité était inféodé, moyennant redevance, à des boulangers qu'on appelait fourniers. Le droit de banalité s'appliquait aussi aux pressoirs, forges, boucheries, etc.
On appelait fournage le droit que le seigneur prélevait sur tous ceux qui étaient soumis à la banalité.
Quand, durant les croisades, des seigneurs vendirent aux communes des banalités, pour couvrir les frais de leurs voyages en Orient, les communes, qui ne pensaient pas à la liberté commerciale, cédèrent, à leur tour, ces droits à des corps de métiers, et de là naquirent en partie les corporations privilégiées jusqu'à la Révolution.
Les corporations des boulangers furent des premières organisées.
On commence à signaler sous Philippe-Auguste, auquel elles payaient une redevance appelée hautban, la corporation des boulangers de Paris, nommée corporation des talemeliers (3). Saint Louis lui donna des statuts où l'on rencontre, d'après M. Ludovic Lalanne, ces particularités : Le nouveau talemelier devait, après quatre années d'exercice, aller, en compagnie de tous les talemeliers et du maître valet appelé joindre (geindre), devant la maison du maître des talemeliers avec un pot neuf en terre rempli de noix et de nieules (oublies) et s'exprimer en ces termes " Maître, j'ai fait et accompli mes quatre années. " Les assistants ayant confirmé son dire, le maître lui rendait son pot, que l'autre allait jeter dehors contre le mur de la maison, puis tous entraient : on devait leur donner " feu et vin ", et chacun d'eux, en revanche, payait au maître un denier.
On retrouve la trace de cet usage dans des statuts du dix-septième siècle.
Les nouveaux maîtres, pendant les trois premières années qui suivaient leur réception, devaient payer au grand panetier (le chef de la maîtrise depuis le dix-septième siècle) cinquante-deux deniers de compte, et au bout de trois ans lui apporter un pot neuf de terre verte ou de faïence, garni d'un romarin ayant sa racine entière, aux branches duquel romarin y aura des pois sucrés, oranges et autres fruits convenables suivant le temps, et ledit pot rempli de pois sucrés (dragées)." Plus tard, la redevance du pot de romarin fut changée en celle d'un louis d'or.
En vertu des statuts de 1305, les talemeliers de Paris, par suite de l'observance des fêtes religieuses qui leur était rigoureusement imposée, ne pouvaient cuire tous les jours de l'année
D'abord ils dépendirent du grand panetier de France; en 1611, la juridiction particulière dont ils jouissaient fut supprimée, et ils passèrent sous l'autorité du prévôt de Paris et du lieutenant de police.
A partir du règne de Louis XIV, et jusqu'en 1789, le nombre des maîtres boulangers de la capitale fut restreint.
L'apprentissage durait cinq ans, le compagnonnage quatre. Ainsi que dans toutes, les autres corporations, il fallait présenter un chef-d'oeuvre, quelque brioche, par exemple; les fils des patrons seuls étaient dispensés de cette obligation.
Le brevet de boulanger coûtait quarante livres; la maîtrise en coûtait neuf cents.
Le saint protecteur de la corporation était Saint-Honoré.
Le grand panetier, dont nous venons de parler, était un des principaux officiers de la couronne; il avait juridiction sur les boulangers de Paris et jouissait de différente droits et privilèges.
Le grand panetier, Lisons - nous dans " l'État de la France " de 1749, n'a que 800 livres de gages et ne sert ordinairement que dans les grandes cérémonies et aux jours de grandes fêtes. Alors, quand le roi est sorti de sa chambre pour aller à la messe, le sert-d'eau crie par trois fois du haut du balcon ou du haut de l'escalier : " Messire N., grand panetier de France, au couvert pour le roi. "
Au moyen-âge, la fonction était plus importante et mieux rétribuée. La grande paneterie était l'une des deux divisions du gobelet du roi, et, son personnel se composait : d'un grand panetier aux appointements de seize cents livres, de douze sommeliers, de quatre aides, d'un garde-vaisselIe, de deux porteurs, et d'un lavandier. Ce personnel avait à préparer, à laver et à resserrer le couvert du roi : assiettes, plats, coupes, linge, pain, etc.
On a une liste incomplète des grande panetiers de France; le premier sur cette liste est Eudes Arrode, mort en 1217; le dernier est de Cossé, duc de Brissac, mort en 1782.
La consommation du pain, comme celle de la viande, ne s'est développée d'une façon rationnelle que de nos jours.
Pendant des siècles, les paysans de France ne mangèrent que la moitié de le quantité de pain qu'ils consommèrentau XIXe; aussi, quand on le sait, ne s'étonne-t-on par de ce portrait saisissant tracé par cet immortel peintre de moeurs qui s'appela la Bruyère.
" L'on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés du soleil , attachés à la terre qu'ils fouillent et qu'il remuent avec une opiniâtreté invincible; ils ont comme une voix articulée, et, quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine, et, en effet, ils sont des hommes. Ils se retirent la nuit dans des tanières, où ils vivent de pain noir, d'eau et de racines; ils épargnent aux autres hommes la peine de semer, de labourer et de recueillir pour vivre, ils méritent ainsi de ne pas manquer de ce pain qu'ils ont semé. "
ls en manquaient pourtant, et souvent; ils en manquaient au point qu'à la suite des guerres désastreuses de la fin du règne de Louis XIV, ils furent réduits à brouter de l'herbe ! "
" Vos peuples meurent de faim, écrivait au grand roi, vers cette époque, Fénelon. La culture des terres est presque abandonnée; les villes et les campagnes se dépeuplent; tous les métiers languissent; tout le commerce est anéanti. "
Et Vauban :
" Près de la dixième partie du peuple est réduite à mendier, les neuf autres parties, cinq ne peuvent faire l'aumône à celle-là, dont elles ne diffèrent guère; trois sont fort malaisées; la dixième ne compte pas plus de 100 000 familles, dont il n'y a pas 10 000 fort à l'aise ".
A ce moment, les fermes les plus considérables étaient désertes, le sol de la France retombait en friche, et il semblait qu'on dut revoir les terribles années de famine du moyen âge, ces années durant lesquelles le cannibalisme avait reparu chez nous et où l'on mêlait argile à la farine pour faire du pain.
" Labourage et pâturage sont les deux mamelles qui nourrissent la France, les vraies mines et trésors du Pérou ", avait dit Sully, et avec lui Henri IV; mais Louis XIV ne partageait pas les sentiments de sage prévoyance de ces deux grands hommes: aussi, quand son royaume fut épuisé par ses guerres et ses dépenses vaines, ses sujets de classes laborieuses souffrirent-ils affreusement.
Alors, c'est tout au plus si, en moyenne, chaque individu consomma, par jour,trois cents grammes de pain, de sarrasin généralement, car les riches seuls étaient à même de se procurer du pain de froment, de pain de sarrasin on d'avoine, et tel que celui qu'on mangea à Paris pendant le siège de 1870-1871.
Nous dirons de la boulangerie, qu'on désigne les pains par leurs formes: pains ronds, longs, cornus, à couronne, et par leur pâte et leur qualité : pain de pâte ferme, pain mollet, pain blanc, pain bis.
Jadis on avait une infinité de sortes de pains de fantaisie uniformément fait, avec de la belle farine de froment, et où il entrait soit du lait, soit du beurre, soit du jaune d'oeuf; par exemple : le pain à la reine, le pain à la Montauron, le pain de Gentilly, le pain de condition, le pain de Ségovie, le pain de Gonesse, le pain Chaland, le pain mouton; nous ne sommes pas moins favorisés, sous ce rapport, que les consommateurs du dix-huitième siècle, et l'on peut dire que nos boulangers sont passés maîtres dans l'art de panifier, témoin le pain riche, le pain dit viennois, le pain de fine fleur de froment, le pain de gluten, inventé pour les diabétiques, et quantité d'autres variétés de pains succulents qui tendent à rapprocher la boulangerie de la pâtisserie.
Mentionnons encore le pain de munition, fait avec de la farine de froment blutée à 15 pour 100, ou dont on a extrait 15 kilogrammes de son sur 100 kilogrammes de grain moulu (en raison de sa composition, ce pain se laisse si mal pénétrer par les liquides qu'on est obligé. de le remplacer, dans la soupe, par du pain blanc); le biscuit de mer, pain de pâte ferme découpé à l'emporte-pièce en tablettes qui sont ensuite percés de trous pour faciliter l'échappement des gaz quelles renferment et les empêcher de lever, et qu'on cuit jusqu'à dessiccation; les grissini, de Turin, petits bâtons de 30 à 40 centimètres de longueur, très croustillants, fabriqués avec de la farine de gruau, légers à l'estomac et agréables au palais; le pain bénit, réminiscence des agapes des premiers siècles du christianisme, et le pain d'épice, qui est, à Paris, l'objet d'une foire fameuse. Le pain bénit est mêlé d'oeuf et de beurre; le pain d'épice est un composé de belle farine, de miel et d'épices: cannelle et clous de girofle réduits en poudre, auquel on ajoute, à volonté, des amandes, des zestes de citron et des écorces d'orange confits et hachés menus, de l'anis et de la coriandre. N'oublions pas non plus le pain de riz, le pain de maïs et le pain de manioc.
Paris, mi-XIXe siècle, ne possédant que trois ou quatre moulins à vapeur, il y entre relativement peu de grain; son approvisionnement se fait en farines provenant spécialement des blés de Brie, de Beauce, de Picardie, et pulvérisés, dans les départements voisins du département de la Seine. Les blés que la France reçoit d'Odessa, d'Amérique et d'Australie, fournissent aussi leur contingent à la consommation parisienne.
On compte quatre cents moulins d'une grande puissance dans les trois départements de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne et d'Eure-et-Loir. Sur ces 400, le département de Seine-et-Oise en possède, pour sa part, 250.
Quant aux boulangers, depuis le décret du 22 juin 1803, qui a proclamé la liberté de la boulangerie, leur nombre a beaucoup augmenté. A Paris, il est aujourd'hui de deux mille, sans parler des dépôts de pain, dont le chiffre est de cinq ou six cent.
Jusqu'au début du XXe siècle, il est à remarquer que le pain français à été reconnu comme le pain le plus agréable d'Europe.